Compte-rendu de la réunion du 02/12/22 au ministère de l’Éducation sur les coupures de courant et fermetures d’écoles qui en découleront.
Cette réunion a eu lieu quelques heures après la publication par la presse des principaux éléments d’une circulaire qui précise aux préfets les modalités d’organisation du pays en cas de “délestage”.
En effet, le contexte international ainsi que l’état du parc nucléaire français (plusieurs centrales à l’arrêt) font peser de lourdes tensions sur les capacités de production électrique du pays et laissent présager de très probables coupures d’électricité à partir du mois de janvier.
Le SNUipp, avec la FSU, a commencé par dénoncer la méthode. Comme aux plus grandes heures de la crise sanitaire, les informations ont fuité dans la presse sans qu’il n’y ait eu aucun échange avec les organisations syndicales, alors même que nous avions alerté dès le mois de septembre de la nécessité de s’organiser bien en amont.
Le ministère nous répond que Matignon a exigé un embargo total sur les travaux en cours ce qui n’a pas permis les échanges souhaités ces derniers jours, y compris par la rue de Grenelle.
Il n’empêche que, même sans travailler sur la circulaire ces derniers jours, les alertes syndicales de la rentrée auraient dû se traduire par un travail d’anticipation, dès le mois de septembre, sur les conséquences concrètes dans l’Éducation de difficultés d’approvisionnement d’électricité, voire d’un black-out total. Le changement de méthode tant vanté par la nouvelle équipe ministérielle subit un premier accroc de taille.
Le principe de la circulaire sur les coupures
A l’exception des Drom et de la Corse, le territoire pourrait connaître des périodes de coupures de courant (délestage).
- À J-3, EcoWatt alertera sur les zones en tension, et le gouvernement activera une communication de crise pour inciter à accentuer les gestes de sobriété et éviter les coupures.
- À J-1, à 15h, les régions concernées par les coupures seront connues.
- Puis à J-1, 17h, chacun-e pourra, en se connectant sur l’appli ou le site Ecowatt, savoir ce qu’il en est, pour le lendemain, de son domicile ou de son lieu de travail.
Les coupures d’électricité se feront par tranche de 2h (8h-10h par exemple) sur chaque demi-journée. Les deux créneaux les plus « à risque » sont 8h-10h et 18h-20h. Une école pourra donc être fermée le matin pour cause de coupure.
Elle ne rouvrira que sur l’heure de midi, voire en début d’après-midi. Le ministère assure qu’une école ne sera pas délestée deux fois dans la même journée et qu’elle ne pourra pas subir plus de trois coupures sur la période de crise, sans que l’on sache cependant ce que peut être la durée d’une crise. Il ne devrait pas y avoir plus de 10 % des écoles et établissements concernés en même temps.
Dans les zones délestées, la coupure sera totale (réseaux des téléphonies et d’internet compris) et seul le 112 devrait fonctionner.
La taille des zones qui seraient privées d’électricité n’est pas encore connue à ce jour. Il est donc impossible de savoir si des parents pourraient travailler dans des zones non délestées alors que l’école de leurs enfants serait fermée.
Du côté du fonctionnement des écoles, le SNUipp-FSU a soulevé un certain nombre de problèmes qui vont rapidement se poser.
Pour les élèves :
Les directeurs et directrices d’école devront assumer une fois de plus une charge supplémentaire. Ils n’auront pas la possibilité de prévenir les parents d’élèves de la fermeture des classes avant 17h00 la veille des coupures, Il n’est donc pas exclu que des enfants se présentent à l’école le matin. Le ministère mise sur une communication générale de la population.
Sur la restauration scolaire, le ministère assure que par endroit, elle sera assurée mais des discussions vont s’engager avec les collectivités la semaine prochaine. Le SNUipp-FSU a souligné la difficulté voire l’impossibilité de prévoir des repas lorsque l’électricité sera coupée de 10h à 13h …
Pour les transports scolaires, les collectivités ne pouvant assurer des rotations le midi, certains élèves seront alors absents toute la journée. Le ministère s’est rapproché des collectivités territoriales, qui se montrent très sceptiques sur la possibilité de s’adapter. Certains élèves seront donc défavorisés.
En cas de fermeture de leur école, certains élèves seront prioritaires pour être accueillis dans des écoles restées ouvertes.
Le ministère assure que la liste sera beaucoup plus restreinte que pour le Covid. Seuls les personnels des hôpitaux, de la sécurité intérieure, des centres pénitentiaires et des entreprises stratégiques seraient prioritaires pour l’accueil de leurs enfants dans des écoles ouvertes.
Une cartographie des écoles accueillantes sera réalisée. Le SNUipp-FSU a émis de gros doutes sur la faisabilité de cet accueil, d’une part parce que le périmètre des zones privées d’électricité n’est pas connu à l’heure actuelle, mais également à cause de la capacité d’accueil des écoles et des conditions que cela entraînerait pour les élèves. .
Pour les personnels :
Les transports en communs (TER et RER) seront concernés par les délestages. Les personnels, en cas de coupure dans leur zone d’habitation pourraient avoir des difficultés à rejoindre leur établissement en zone non délestée.
De la même façon, quid de la question de l’accueil des enfants d’enseignant.es lorsque leur école sera fermée ?
Pour tout ce qui relève des droits des personnels, le ministère invite à se rapprocher de la Fonction publique. Pour le SNUipp-FSU, les personnels ne devront faire l’objet d’injonctions et de pressions particulièrement malvenues en cette période de crise.
Le SNUipp-FSU a rappelé son incompréhension de voir les écoles considérées comme non prioritaires alors que durant toute la période du Covid, le précédent ministre a sans cesse rappelé qu’elles ne devaient pas fermer,
Le ministère assure avoir plaidé pour que l’Éducation nationale ne soit pas concernée par les coupures mais qu’il n’a pas été possible d’obtenir cette dérogation compte tenu de l’état des infrastructures électriques. Pour le ministère, il n’était ensuite pas question de laisser les établissements ouverts sans lumière ou chauffage au regard des risques que cela fait courir aux usagers et aux personnels (pas d’alarme incendie, intrusion, obscurité etc).
Le SNUipp avec la FSU a rappelé qu’il n’était pas question d’ouvrir en « mode dégradé » mais bien que les écoles et établissements puissent être prioritaires dans l’approvisionnement en énergie.
Le SNUipp et la FSU ont demandé la tenue d’une nouvelle réunion dès le début du mois de janvier afin d’obtenir des réponses techniques. Les recteurs vont organiser des réunions dans les semaines à venir avec les organisations syndicales.
Nous pensions en avoir terminé avec l’impréparation et la responsabilisation des individus sur les bonnes pratiques. Le gouvernement n’a donc tiré aucun enseignement des expériences antérieures liées au Covid.
C’est révélateur de l’impréparation du pays pour faire face à une nouvelle crise majeure qui fait qu’au final l’état des infrastructures conduit à des choix politiques synonymes de renoncement.
Si certains discours du MEN se voulaient rassurants, il y avait quand même un côté « apocalypse annoncée », tout en disant qu’on pouvait l’éviter si chacun faisait un effort ! C’est aussi le discours général du gouvernement.
L’occasion pour la FSU de rappeler qu’on ne demande visiblement pas des efforts à tout le monde : grandes entreprises, remontées mécaniques dans les stations de ski, enseignes lumineuses …